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Quatuor Terpsycordes

Joie et alchimie des rencontres

Le Courrier

Joie et alchimie des rencontres

Le Courrier, 7 novembre 2018

"Joie et alchimie des rencontres", propos recueillis par Marie Alix Pleines

Adepte des mélanges musicaux, le Quatuor Terpsycordes revisite Piaf et Piazzolla dans un album
qui sera verni samedi. Entretien avec son premier violon, Girolamo Bottiglieri.

Musique X Eclectique et généreux, le Quatuor Terpsycordes est non seulement gourmand d’expériences musicales inédites, mais surtout de rencontres humaines enrichissantes et stimulantes. Après avoir bourlingué à travers le grand répertoire classique depuis sa création en 1997 à Genève, la formation chambriste a notamment sillonné la Chine dans des tournées concertantes foisonnantes, réalisé des albums de plusieurs compositeurs modernes et contemporains – Gregorio Zanon, Javier Torres Maldonado, René Gerber et Ernest Bloch – ou collaboré avec Trionyx du jazzman Maël Godinat. La dernière aventure musicale du quatuor – avec le bandonéoniste William Sabatier autour de Piaf et Piazzolla – se solde par un CD, produit par le label belge Fuga Libera et verni samedi à la Fondation Heim à Chambésy. Entretien à archet délié avec son premier violon Girolamo Bottiglieri.

D’où vous vient cet éclectisme qui vous fait aborder avec autant de passion Mozart, Beethoven, Piazzolla, des compositeurs contemporains ou même le jazz expérimental?
Girolamo Bottiglieri: De la joie de la rencontre, humaine et artistique. Tout en constatant que depuis une bonne dizaine d’années, ces rapprochements entre styles et combinaisons sonores sont dans l’air du temps. Sans minimiser l’impulsion d’une amitié de longue date, notre collaboration actuelle avec William Sabatier a d’ailleurs été largement facilitée par le fait qu’Astor Piazzolla avait même composé un répertoire original pour quatuor à cordes et bandonéon. Dans la foulée, William Sabatier a réalisé pour ce même effectif instrumental une suite inspirée librement des chansons d’Edith Piaf.

Un quatuor à cordes qui collabore avec un ou plusieurs autres instruments revêt-il de fait une fonction orchestrale?
Pas forcément, car si d’autres instruments à cordes complètent l’ensemble, la sonorité collective est naturellement enrichie sans que le quatuor ne prenne forcément le rôle d’accompagnement orchestral. En revanche, lorsqu’il s’agit d’un instrument différent, comme ici le bandonéon, l’ardeur polyphonique s’intensifie. Et l’élan artistique de notre quatuor est immanquablement stimulé par une confrontation chaleureuse avec d’autres artistes.

Vous avez joué en octobre au festival du Bois qui chante. Un retour au sources, puisque le bois de la table de résonance de vos instruments provient notamment de la forêt de Rougemont?
C’est une manière poétique de l’énoncer! Ce concert au Temple de Château d’OEx était en effet une sorte de retour aux sources, car nous y avions déjà fait escale à ses débuts, il y a une quinzaine d’année (la première édition a eu lieu en 2001, ndlr). La magie du lieu et la convivialité de la manifestation nous donnent l’impression de rentrer chez nous. Outre le programme Piazzolla-Piaf, qui constitue l’essentiel de notre nouvel album avec William Sabatier, nous avons également interprété le quatuor de Debussy. Son ambiance impressionniste et la filiation avec Nadia
Boulanger – avec laquelle Piazzolla a d’ailleurs étudié – met bien en perspective la musique du compositeur argentin, qui résidait à Paris quelques décennies après que Debussy y ait composé son quatuor à cordes.

En 2012, pour les quinze ans de votre quadruple rencontre, vous avez effectué entre autres une tournée en Chine. Comment s’est passée l’alchimie entre musique classique et Empire du Milieu?
Les moeurs diffèrent, à l’évidence. L’approche du public chinois envers les concerts est beaucoup moins formelle qu’en Europe. Comme celui des
spectacles de la Renaissance européenne, l’auditoire participe à la fête et l’ambiance est assez dissipée. Mais nous avons rencontré des publics très curieux, ouverts et friands de nouveauté. Les transcriptions de chansons populaires chinoises, que nous avions insérées dans des programmes principalement classiques, ont aussi été accueillies avec enthousiasme. Chacun de nos concerts a fait quasiment salle comble!
Pour les interprètes classiques contemporains, la Chine représente un immense territoire pratiquement vierge, en proie à un engouement constant pour tout ce qui vient d’ailleurs. Cela se remarque notamment dans l’essor admirable de la lutherie locale: les instruments
à cordes chinois, médiocres il y a quelques années, sont devenus aujourd’hui les champions du rapport qualité-prix.

Quatuor Terpsycordes et William Sabatier,
Piazzolla-Piaf, Fuga Libera, terpsycordes.com
Vernissage (sur invitation), sa 10 novembre,17h-19h, Fondation Heim, 6 ch. du Champ de Blé, Chambésy (GE), www.fondationheim.ch